Les verts des trous 15, 16 et 18 seront entourés de dizaines de milliers de spectateurs lors de la compétition; l'avantage d'un parcours de type TPC. |
La Coupe Ryder est de retour en Europe continentale
pour la deuxième fois seulement de son existence, et c’est sur le parcours
Albatros du Golf National de France que la compétition aura cette fois
lieu. Le parcours Albatros est bien
connu des golfeurs européen qui le fréquentent depuis près de trente ans
puisque ce dernier agit comme site de l’Open de France depuis 1990.
Le design du parcours est aujourd’hui crédité à Hubert
Chesnaux, ancien capitaine de l’équipe de golf de France (1975-1979) et
architecte de formation. Celui-ci a créé quelques parcours de golf en France
avant de s’attaquer à l’Albatros et c’est son implication dans la Fédération
Française de Golf qui lui a valu la chance d’être l’architecte de ce qui allait
devenir le Golf National. Un mystère persiste toutefois quant à l’implication
même de M. Chesnaux dans le design du parcours. Certains historiens et fans
d’architecture attribuent plutôt le plus gros du design du parcours à
l’architecte américain Robert von Hagge et son équipe, alors que ce dernier
avait été engagé à titre de consultant au design suite à l’ouverture du Club
Les Bordes, en 1987 – un parcours qui fut immédiatement reconnu comme l’un des meilleurs
de France à l’époque. Bien que le style particulier de von Hagge soit présent
sur l’ensemble du parcours, il semble qu’on tente aujourd’hui d’en minimiser
l’apport au profit de M. Chesnaux. C’est du moins ce que l’on peut constater
sur le site web du parcours ou dans quelques-unes des publications officielles
du tournoi. Un récent article paru dans l’édition de juillet du magazine
« Golf Architecture » fait état de cette curieuse situation (Voir le
lien après le présent article).
Trou no. 5 - Certains trous présentent un look qui s'apparente aux links desquels ils s'inspirent. |
Peu importe qui en a fait le design, le Golf National
de France est sans aucun doute un choix qui s’inscrit dans la logique
mercantile du tournoi. En effet, puisque le parcours a été conçu dans l’esprit
des « Tournement Player Clubs » tels qu’on les retrouve un peu
partout en Amérique du Nord, toutes les infrastructures sont déjà en place pour
accueillir un évènement de la sorte. La proximité du parcours avec la ville de
Paris en fait également un endroit de choix pour accueillir de nombreux
spectateurs. Le fait que les golfeurs européens foulent les allées du club à
chaque année lors de l’Open de France fait en sorte que ceux-ci connaissent
bien ses secrets. Pas de doute que ceci pourrait être à l’avantage de l’équipe
Europe.
Une
topographie au service des spectateurs
Conçu par la Fédération Française de Golf expressément pour accueillir l’Open de
France, le parcours fut construit sur une site entièrement plat qui fut
transformé et renivellé pour offrir un design qui permettrait l’organisation de
tournois de manière optimale. Des quantités immenses de terre furent importées
sur le site pour construire de larges monticules permettant aux spectateurs de
suivre l’action de manière aisée. De grands étangs furent également aménagés
pour améliorer le drainage du site et créer des trous offrant des coups
dramatiques en vue de générer un bon spectacle.
C’est sans aucun doute l’une des raisons pourquoi on l’a choisi comme
site hôte de la Coupe Ryder. On peut donc s’attendre à des trous au centre de
vallées bordées de monticules surélevés isolant ainsi les trous les uns des
autres tout en offrant de bons points de vue pour la télé
Un
links ou un parcours typiquement nord-américain?
Trou no. 2 - D'autres trous semblent sortir tout droit d'un parcours floridien. |
Considéré comme étant très difficile par les
professionnels, ce parcours est un croisement entre le TPC à Sawgrass et un
parcours de type « links » sans toutefois en présenter les conditions
de jeu caractéristiques. En effet, ici,
les conditions de jeu fermes et rapides seront probablement absentes et la
balle roulera beaucoup moins que sur les fameux « links ». L’herbe
longue y sera également beaucoup plus dense que la fine fétuque écossaise! L’influence
du TPC à Sawgrass se fera sentir de plusieurs manières, premièrement par le jeu
aérien qui est préconisé sur plusieurs trous de style « target golf »
où les allées sont des îles au milieu d’une mer de gazon long et où des
obstacles d’eau viennent frôler des verts imposants où il y a peu de marge de
manœuvre. La présence de murets de bois en bordure des étangs complète les
ressemblances avec le célèbre parcours diabolique de Pete Dye qui était bien en
vogue à l’époque où le parcours fut construit. Inutile de dire que les golfeurs
auront peu d’options et ils devront exécuter leurs coups méthodiquement pour
éviter les erreurs qui leur feront perdre de précieux points au classement.
Des
fosses de sable peu en jeu
Une chose est certaine : les fosses de sable ne
seront pas un facteur déterminant sur ce parcours. En effet, il n’y en a que 37
en tout. Neuf trous n’ont pas de fosses d’allées, et cinq verts n’ont pas de
fosses à leurs abords. Ce sont donc les contours des verts, l’herbe longue et
les obstacles d’eau qui agiront en tant qu’obstacles que devront contourner les
golfeurs. Ceci est quelque peu surprenant pour un parcours voulant reproduire l’apparence
des links. Les quelques fosses présentes sont quant à elle bien souvent dans
des zones hors-jeu ou peu en jeu pour les professionnels.
Conclusion
Trous nos. 15 et 18. Espérons que les matches se rendront jusque là; le tout pourrait être intéressant! |
Le choix des parcours hôtes de la Coupe Ryder est bien
souvent une déception à mes yeux, et ce, surtout lorsque le tournoi se déroule
en Europe. Bien que je comprenne l’idée de vouloir présenter la compétition
dans plusieurs pays différents afin d’intéresser le plus grands nombre à la
compétition, je me questionne souvent quant aux choix des organisateurs. En France, il aurait été intéressant de
présenter le tournoi sur l’un des parcours de l’architecte Tom Simpson :
Morfontaine, Chantilly ou Fontainebleau – des parcours considérés comme les trois
meilleurs du pays et parmi les meilleurs d’Europe continentale. Et pourtant, on
a choisi un parcours qui s’apparente plus à un faux links américain tel qu’on
en voit des dizaines ici sur notre continent. Évidemment, ces parcours sont
peut-être moins spacieux et plus éloignés de Paris, mais ils ont aussi beaucoup
plus de caractère. La décision peut s’expliquer d’un point de vue monétaire et
fonctionnel, mais elle contribue à minimiser mon attrait pour le tournoi. Peut-être suis-je un peu conservateur dans
mes goûts, mais pourquoi ne pas tenir cette compétition sur des parcours de
type links lorsqu’elle se déroule en Europe. Ne serait-ce pas là un avantage du
terrain pour les golfeurs Européens qui sont plus habitués à ce type de
parcours? Ceci étant dit, les européens ne sont pas les seuls à user de cette
tactique de plus en plus courante, soit celle de présenter des tournois sur des
parcours de plus en plus modernes où les infrastructures sont plus spacieuses
et propices à accueillir de nombreux spectateurs, et plus de tentes
corporatives. C’est malheureux, d’un amoureux des parcours, mais au bout du
compte, c’est le jeu des golfeurs qui rend le spectacle plus intéressant.
Ceci étant dit, le contexte actuel fera en sorte que
la compétition aura un attrait bien spécial cette année. En effet, le retour en
force de Tiger Woods suscitera à lui seul un engouement que n’espéraient surement
pas les organisateurs en début d’année! Qui aurait cru qu’il serait capable d’un
tel retour? Faire partie de l’équipe est déjà un exploit remarquable, mais le
fait qu’il ait mérité sa 80e victoire en carrière la semaine avant
la compétition ne fera que relever le niveau d’intérêt de tous les
téléspectateurs qui la suivront.
Pour la description officielle du parcours pour la
compétition, cliquez-ici.
Pour plus d’info concernant la controverse entourant
le crédit architectural du parcours, cliquez-ici.
Yannick Pilon Golf © 2018