Un parcours diabolique et unique qui
a bien vieilli
Le TPC à Sawgrass
(Tournament Players Club) est aujourd’hui l’un des parcours de golf des plus
appréciés de la part des joueurs du PGA Tour, mais ce ne fut pas toujours le
cas. Peu après son ouverture, en 1980,
et suite à la tenue des premières rondes du Players Championship de 1982,
plusieurs joueurs avaient émis des commentaires forts négatifs et colorés à son
sujet. Jack Nicklaus avait mentionné ne pas être très talentueux pour faire
stopper des coups d’approche de fer 5 sur le dessus de capots de voitures,
tandis que J.C. Snead avait quant à lui mentionné que le parcours était composé
à 90% d’excréments de chevaux et à 10% de chance! Disons que ces commentaires
ont eu pour effet de fouetter l’architecte du parcours, en l’occurrence, le
légendaire Pete Dye. Celui-ci entreprit
alors d’adoucir son œuvre tout en la perfectionnant au fil des années, jusqu’à
aujourd’hui.
L’histoire de ce
club est particulièrement intéressante. Celui-ci fut fondé par Deane Beman,
alors commissaire du circuit, afin de créer un parcours qui deviendrait l’hôte
permanent du Players Championship, en plus de servir de modèle de base à
l’élaboration d’une série de parcours TPC à travers les États-Unis devant
servir à la tenue de tournois de la PGA.
Lors de la conception du parcours, Pete Dye s’était fait donner deux
directives très précises : le parcours devait être conçu pour faciliter le
suivi du tournoi par les spectateurs, et il devait être conçu pour être
« démocratique », afin de tester tous les aspects du jeu d’un joueur,
sans favoriser un style de jeu particulier.
Le résultat, à ces deux égards, paraît plutôt réussi.
À l’origine des parcours de type TPC? Pas si sûr…
Bien que l’on
associe souvent le TPC à Sawgrass au fait d’avoir été le premier parcours conçu
avec les spectateurs en tête, c’est plutôt à Jack Nicklaus que devrait revenir
le mérite puisque c’est lui qui avait parti le bal quelques années auparavant
avec son parcours de Glen Abbey situé à Oakville, en Ontario. Ce dernier,
ouvert en 1976, suivait de deux années le parcours de Muirfield Village, situé
en Ohio. C’est avec ces deux parcours que Nicklaus a peaufiné son concept pour
créer des parcours favorisant les spectateurs et qui aujourd’hui encore, sont
utilisés comme parcours hôtes de tournois du PGA Tour pour le tournoi Mémorial
et l’Omnium Canadien. Nicklaus avait, entre autres, conçu Glen Abbey sur le
principe d’avoir plusieurs trous retournant vers la zone centrale du chalet
autour duquel se trouvaient plusieurs espaces aménagés pour avoir une bonne
vision du jeu et dédiés aux spectateurs.
Mais c’est sans
aucun doute le parcours du TPC à Sawgrass qui contribua à populariser le
phénomène grâce à ses trous complexes et/ou controversés, tel le fameux
dix-septième et ses monticules gigantesques permettant à des milliers de
spectateurs d’apprécier les prouesses des meilleurs joueurs au monde.
Un parcours équilibré
Comme tout bon test
de golf, le parcours a été conçu de manière à ce qu’il n’y ait jamais deux
trous successifs dans la même direction, assurant ainsi que les vents dominants
feraient jouer les trous de manière différente sans favoriser un joueur au
détriment d’un autre ailleurs sur le parcours. Un bon mélange de courtes et
longues normales 3, 4 et 5 et de trous coudés autant vers la gauche que vers la
droite devait assurer un bon équilibre et une chance égale pour tous les
joueurs. Aujourd’hui, bien que le parcours mesure un respectable 7245 verges,
il offre une grande diversité de trous avec plusieurs normales quatre
passablement courtes, de même que deux ou trois normales cinq facilement
atteignables en deux coups.
Des dormants de bois bien présents
Pete Dye a
popularisé l’usage des dormants de bois dans les années 80 et 90 en les
utilisant à toutes les sauces dans une grande proportion de ses parcours. Issus
initialement des links écossais où ils servaient à créer des murs dans les
fosses de sable, Pete Dye commença à les utiliser en bordure de hasards d’eau
où ils réduisaient la marge d’erreur à son plus strict minimum. Soit la balle
reste sur le gazon, soit elle tombe dans l’oubli, avec un coup de pénalité en
prime. Certains joueurs sont même allés
jusqu’à mentionner que les parcours de Pete Dye étaient les seuls qui étaient
susceptibles de passer au feu! Aujourd’hui, au TPC à Sawgrass, les murets de
bois sont si présents qu’ils font pratiquement partie de l’ADN du parcours (Ils
sont présents au moins sur les abords des étangs sur les trous nos. 4, 5, 11,
12, 13, 15, 16, 17 et 18). D’ailleurs, on trouve ici au Québec, quelques traces
de ces même dormants de bois qui ont été utilisés par la famille Dye dans le
redesign du parcours du Country Club de Montréal réalisé en 1974! Les trous
nos. 4 et 6 du parcours ont encore quelques-uns de ces dormants de bois en
bordure de leurs verts.
Trous à souligner
Trou no. 11 – Normale 5
Le trou no. 11 est
l’un de mes préférés du parcours à cause de son style grandiose illustrant
parfaitement l’architecture de Pete Dye durant les années 80. L’allée y est gracieusement courbée autour de
longues fosses de sable et bordée d'un arbre majestueux influençant la
stratégie des golfeurs. L’allée est coupée en deux par un étang, une longue
fosse de sable et un muret qui s’étendent jusqu’à la droite du vert, également
bordé à sa gauche par un duo de « pot bunkers » diaboliques et de
multiples ondulations inconfortables pour les coups d’approche. Du Pete Dye tout craché! On devrait y voir
plusieurs oiselets.
Trou no. 12 – Normale 4
Le trou no. 12 a été
redessiné pour le tournoi de cette année.
Alors qu’il était auparavant très semblable au trou no. 10, il a été
raccourci afin que les golfeurs puissent atteindre le vert avec leurs coups de
départ. Ce sera toutefois risqué, bien
entendu, puisqu’un étang a été positionné tout juste à la gauche du vert, au
bas d’une pente qui sera rasée pour l’occasion, faisant en sorte de capter
toute balle qui sera légèrement hors cible.
Ceux qui décideront de jouer de manière conservatrice devront s’assurer
de garder leur balle dans l’allée, puisque celle-ci a été redessinée pour avoir
une pente de gauche à droite qui poussera toute balle trop longue vers une
dépression à partir de laquelle seul le sommet du drapeau sera visible pour les
coups d’approche.
Trou no. 16 – Normale 5
Le trou no. 16
marque le début de la fin pour ce parcours avec le premier de trois trous
spectaculaires et susceptibles de marquer la fin du tournoi. Cette courte normale cinq invite les joueurs
à atteindre le vert en deux coups dans l’espoir de faire une dernière charge
avant de s’attaquer en deux derniers trous qui s’avèrent très dangereux. À 523
verges, c’est pratiquement une normale 4 pour la majorité des joueurs. Mais ces derniers doivent cependant effectuer
un coup de départ précis qui les mènera à un endroit à partir duquel il sera
possible d’atteindre le vert sans avoir à négocier avec un arbre imposant qui
en masque partiellement l’entrée pour tout golfeur provenant du côté gauche de
l’allée. Ceci rend l’étang à la droite
du vert très présent et le coup d'approche très risqué pour les golfeurs trop
gourmands! On pourrait y voir des aigles et des oiselets en quantité, mais
aussi des bogeys coûteux!
Trou no. 17 – Normale 3
Évidemment, c’est le
trou que tout le monde veut voir. Le trou no. 17 est certainement l’un des plus
spectaculaires au monde à regarder lors d’un tournoi. Il génère une telle
tension que ce trou peut à lui seul ruiner une bonne performance et décider de
l’issue du tournoi. Je ne suis pas un fan de l’idée des « Island
Green », mais dans le contexte d’un tel tournoi, le tout est très
intéressant à regarder étant donné les enjeux auxquels font face les golfeurs
si tard durant leur ronde. Cette année, l’équipe de télédiffusion tente même
une expérience afin de diffuser des images en réalité virtuelle en direct de ce
trou sur les plateformes de Twitter et Periscope, et ce, pour toute la durée du
tournoi. Des images utilisant les dernières technologies de réalité virtuelle
seront visibles grâce aux lunettes Samsung Gear VR et en utilisant l’application
PGA Tour VR Live apparemment disponible sur le site www.oculus.com. Je commence à être dépassé en matière de technologie,
mais bon, peut-être êtes-vous plus branchés que moi!
Trou no. 18 – Normale 4
Le trou no. 18 est
semblable à bien des dix-huitièmes trous du portfolio de Pete Dye. Il conclut souvent ses parcours avec une
longue normale quatre passablement difficile avec un lac longeant généralement
le côté droit du trou sur toute sa longueur. (Généralement, le neuvième trou se
trouve en miroir de l’autre côté de l’étang!).
Ce qui rend ce trou intéressant, c’est l’angle de l’allée qui forme une
longue courbe vers la gauche avec une absence de toute référence visuelle
aidant le golfeur à s’aligner adéquatement pour prendre la ligne la plus courte
vers le vert. Ceci fait en sorte qu’il
est facile de mal juger la distance nécessaire pour rester au sec en longeant
le côté gauche de l’allée, et qu’il est, par opposition, aussi très facile de
jouer de manière trop conservatrice vers la droite de l’allée ou le boisé est
omniprésent et facilement accessible avec un coup en crochet vers la
droite. Il faudra des nerfs d’acier pour
effectuer une coup de départ parfait sur ce trou en fin de journée dimanche!
En conclusion
Que l’on aime ou non
le style particulier de Pete Dye, il ne fait aucun doute que ce parcours
constitue l’une de ses plus grandes œuvres et que celui-ci produit bien souvent
des tournois à la finale spectaculaire.
Même si à l’origine, ce parcours a été détesté par les joueurs qui
étaient bien souvent déstabilisés par ses défis peu communs et son esthétique
unique, il ne fait nul doute aujourd’hui que Pete Dye a peaufiné son œuvre pour
en faire une qui fait aujourd’hui presque l’unanimité sur le PGA Tour. Ce n’est pas pour rien que les plus grands
joueurs du monde s’y donnent rendez-vous à chaque année pour offrir un plateau
qui est bien souvent plus relevé que dans les quatre véritables tournois
majeurs du golf. Pour l’ensemble de ces raisons, le Players Championship est un
tournoi à ne pas manquer au calendrier. Bon weekend de golf!
Pour en savoir plus
sur l’expérience « Live VR 360 Video experience » au 17e
trou, cliquez-ici.
Pour consulter le
« Yardage Guide » très bien conçu du parcours, cliquez-ici.
Pour des
informations concernant le réseau des parcours TPC à travers les États-Unis,
cliquez-ici.
Pour une brochure
décrivant le réseau des parcours TPC à travers les États-Unis, cliquez-ici.
Yannick Pilon Golf ©
2017
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